« Quoi d’autres, sinon des cicatrices, pouvait rendre la mesure d’un homme et de ce que son âme avait enduré ? A quelle autre aune que la souffrance pouvait-on juger une vie ? »
Alex Taylor

Les comptes-rendus-avis de lecture de la librairie Vaux Livres

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Romans traduits par François Gaudry

Elsa OSORIO

Double fond
Métailié

6 | 400 pages | 28-01-2018 | 21€

Marie Le Boullec, médecin, près de Saint-Nazaire partageait une vie paisible avec son époux, Yves, photographe qui vient de mourir. Peu de temps après, le corps de Marie est retrouvé sur une plage, noyée mais avec quelques blessures singulières. Muriel Le Bris a rejoint depuis peu la rédaction du journal local et elle est réputée pour aimer fouiner avec insistance là où certains abandonnent rapidement. Or, elle demeure circonspecte devant la thèse du suicide… Alors aidée par Geneviève, une vieille voisine de Marie qui ne l’a pas oubliée, Marcel, amoureux transis de Muriel toujours prêt à la suivre jusqu’au bout du monde, Marie se lance dans une enquête vertigineuse entre l’Argentine et la France, entre les années 70 et 2000 qui la confrontera au régime dictatorial argentin où tous les coups étaient permis, où violence et torture étaient le quotidien de beaucoup. Les opposants traqués pouvaient être éliminés partout dans le monde. Le filet était déployé et peu s’en échappait. Marie l’avait peut-être cru quelques brefs instants… Ce récit entre roman historique, roman d’espionnage, polar, oscille constamment entre passé et présent, brouille les identités, nous parle d’engagements et de traques, de pouvoir et de mafia, mais aussi d’une mère qui ne pourra jamais se satisfaire de rester éloignée de son fils et n’abdiquera jamais. Un roman glaçant et habilement construit, un portrait de femme émouvant pour ne pas oublier la violence d’état et l’histoire de l’Argentine.

« Il fera ce qu’il est venu faire : la jeter à la mer depuis un avion. La mort qui devait être celle de Juana Alurralde en 1976 avait été différée à juin 2004. C’est bien tard, mais Raul Radias allait réparer son erreur. »

« Il existe une autre mort qui n’est pas la mort définitive, être brisé, broyé, mais combien de fois peut-elle être réduite en miettes sans être complètement brisée ? Une infinité. »

« C’est ça un disparu. Un vide, des souvenirs, des paroles, mais pas de corps. Comme le disait le dictateur Videla : ni vivant , ni mort, ni disparu. »

Ecouter la lecture de la première page de "Double fond"

Fiche #2077
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry


Pablo CASACUBERTA

Ici et maintenant
Métailié

5 | 165 pages | 04-02-2016 | 17€

Maximo est un adolescent solitaire, passionné par les sciences qu’il découvre dans deux revues scientifiques qu’il adore. Son savoir croit de jour en jour, il en est conscient et assez satisfait et pense qu’il s’agit d’un passage obligé vers l’âge adulte. Etre adulte, enfin ! Une pensée, une attente, un espoir qui l’obsèdent. Il a 17 ans, vit chez sa mère, son père a disparu et son oncle fait preuve d’une présence parfois pesante, quant à son frère, il l’agace profondément. Aussi, pour accélérer sa mutation, Maximo, quelques poils sur le menton, postule pour une place de groom dans un hôtel. La patronne est charmée et intriguée et convainc son époux de l’embaucher, et voici, Maximo, ne cessant de s’observer, parti pour un voyage sans retour, d’une journée vers le pays adulte. Un roman d’apprentissage rythmé et d’une grande maîtrise bonifié par un ton et une atmosphère singuliers.

« Moi, je crois que je suis devenu adulte quand j’ai cessé d’y penser. Ca viendra »

Ecouter la lecture de la première page de "Ici et maintenant"

Fiche #1751
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry


Javier SEBASTIAN

Le cycliste de Tchernobyl
Métailié

4 | 205 pages | 11-08-2013 | 18€

en stock

Un vieil homme avec deux sacs de vêtements est abandonné sur les Champs-Elysées par une femme qui semble pourtant attentionnée. Un fonctionnaire venu assister à la Conférence des Poids et Mesures assiste à la scène. Il signale au serveur cet abandon et ce petit geste irrémédiable lui vaut d’hériter du vieil homme qui reste muet quelques jours avant de répéter « Ne les laissez pas me tuer ». Le récit oscille alors entre présent et passé, entre témoignage et enquête. Le lecteur assiste à la survie d’une petite communauté à Pripiat après Tchernobyl : « Je n’ai plus rien à perdre et à Pripiat on n’est pas si mal. Sauf qu’on y meurt, mais on meurt partout. ». Ces samosiols, « … c’est comme ça qu’on appelle ceux qui sont retournés chez eux… C’est un peu une insulte… Ils reviennent car ils n’ont pas d’autres endroits où aller. », continuent de vivre dans une terre morte et dangereuse. Des éclairs de vie jaillissent, furtifs, et ils ne les ratent pas. L'homme s'adapte à tout... Certains semblent garder illusion d’un nouveau monde mais sont vite rappeler à la raison (« … c’est précisément ce que nous voulons, aller nulle part. On est très bien comme ça. »). Les trafics s’organisent, le voyeurisme les atteint aussi… Cette petite communauté est rejointe par un scientifique résistant, Vassili Nesterenko, qui n’a pas cru en la thèse officielle, et que les services secrets ont repoussé jusque là. Cet homme qui a été ébranlé dans ses convictions, dans sa croyance absolue en la science et dans le progrès associé, parcourt la ville sur sa bicyclette et continue de croire que leur communauté posera les fondements d’un nouveau monde. Un roman magistral par sa construction mais aussi par son spectre, à la fois roman historique, enquête scientifique, témoignage, polar, portrait libre du scientifique Vassili Nesterenko qui paiera cher sa volonté d’informer des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl. Après "la nuit tombée" de Antoine Choplin, essentiel pour ne pas oublier…

Ecouter la lecture de la première page de "Le cycliste de Tchernobyl"

Fiche #1340
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry


Elsa OSORIO

La Capitana
Métailié

3 | 335 pages | 15-07-2012 | 20€

« La Capitana » narre la vie exceptionnelle et romanesque de Micaela Feldman de Etchebéhère, de la Patagonie à Paris et Berlin, en passant par la guerre d’Espagne, remarquable destin, vie aventureuse et amoureuse hors du commun. Mais également vie engagée, avec son compagnon, cette femme a toujours été aux côtés de ceux qui souffraient et luttaient, il y a chez elle une dimension humaine singulière, tous les hommes, ici et ailleurs, doivent être libres et elle ne cessera avec son mari de se battre physiquement et intellectuellement pour. A Paris dans les mouvements intellectuels des années 30, à Berlin auprès des ouvriers allemands, puis enfin, chassés par le nazisme, ils rejoindront la lutte contre Franco et les milices du Poum. Sans expérience militaire, elle prendra pourtant la tête d’une milice, les hommes aguerris l’admirent, la respectent et lui accordent leur confiance sans aucune retenue. Mais ce récit est aussi celui d’un couple, qui se construit au gré des luttes, des idées et convictions partagées et défendues, des rencontres fortuites. Roman historique, roman d’aventures, portrait d’une femme exceptionnelle libre, amoureuse et engagée qui a constamment cru en un monde meilleur et juste et d’une vie militante désintéressée, ce texte émouvant vous plonge au cœur de l’histoire tumultueuse du XXème.

« Tu te proclamais anarchiste et libertaire. La vie s’est chargée d’engagement, de responsabilité. Et d’espoir. Quand tu as prononcé, ton premier discours à quinze ans, tu as su que tu étais capable de transmettre des idées et d’inciter les autres à l‘action. »

Ecouter la lecture de la première page de "La Capitana"

Fiche #1150
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry


Eugenia ALMEIDA

La pièce du fond
Métailié

2 | 200 pages | 11-04-2010 | 18.5€

La pièce du fond se déroule dans un petit village où tout est immuable, un village figé dans la douleur et le silence où personne ne prend garde à son voisin, on se salue mais on s’ignore. Pourtant quand Sofia ira au devant d’un homme solitaire et taciturne installé sur la place du village, l’entourage et le voisinage s’inquiètent. Lorsqu’une nouvelle psychiatre s’exprime avec sincérité dans la clinique psychiatrique du village, le train-train semble s’ébranler. Deux présences étranges, insolentes, qui viennent bousculer les habitudes et il n’en faut pas moins pour faire éclore les sentiments des villageois mis jusqu’à maintenant sous éteignoir. Eugenia Almeida propose avec une écriture poétique et métaphorique une série de portraits (« Nous avons tous nos problèmes. A tous il nous manque plus ou moins quelque chose ») d’une grande justesse dans un village qui mourait dans ces certitudes et que deux personnages inattendus réveilleront subrepticement.

Fiche #746
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry


Evilio ROSERO

Les armées
Métailié

1 | 156 pages | 02-08-2008 | 9€

Ce roman débute dans un village colombien avec une ambiance de douceur, de calme voire de volupté. Ismael, vieil instituteur, cueille des oranges et en profite pour admirer sa voisine, superbe, qui se dore nue au soleil. Il forme avec sa femme un vieux couple heureux. Puis, peu à peu, le lecteur se retrouve plongé dans la violence, l’horreur et la folie humaine. On apprend tout d’abord que des enlèvements se produisent dans le village où tout le monde se connaît. Des guérilléros, trafiquants et autres paramilitaires occupent le village sans savoir lesquels sont responsables de tel ou tel enlèvement. La peur monte, la suspicion gagne les villageois, l’angoisse sourde les étreint irrémédiablement. L’incompréhension habite les villageois et Ismael à la disparition de sa femme se sent perdu. Les habitants qui le peuvent quittent la ville, la plupart reste, sans espoir. Ismael et son pays suivent la même voie. Le délitement de son pays renvoie Ismael à sa perte de mémoire. Il sent peu à peu sa mémoire et sa raison le quitter. Qui sont les victimes ? Qui sont les coupables ? Déchéance d’un pays, déchéance individuelle. Tout devient flou. Un roman terrible à l’image de la folie des hommes qui nous laisse inquiets et quelque peu désespérés pour ce pays et ses habitants.

Fiche #429
Thème(s) : Littérature étrangère
Traduction : François Gaudry